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LA COLOMBIERE

LA COLOMBIERE

ou l'Art de s'emmêler les pinceaux entre Atelier et Vie de famille

Devenir rebelle ?

Je suis une sorcière depuis longtemps, tout le monde le sait, tout le monde le dit, mais suis-je une rebelle pour autant ?

Nan !

Définitivement non, du moins pour mon projet d'agricultrice/productrice de PPAM.

Tiens, au fait, PPAM, ça veut dire quoi au juste ? Je vous en parle souvent mais je ne l'ai jamais vraiment écrit en entier. Cela signifie : Plantes à Parfum Aromatiques et Médicinales.

Maintenant que ce point est éclairci, petite explication : j'aime les plantes depuis toujours mais mon côté pragmatique ne m'a jamais vraiment permis d'en profiter pleinement parce que j'avais toujours le regret que certaines d'entre elles ne servaient à rien d'autre qu'à être jolies. Ce qui est déjà bien en soi ! Le monde serait tellement laid et triste sans les plantes ! Et nettement plus difficile à vivre, aussi, au passage. Donc je dis : merci les plantes !

Mais n'ayant pas toujours les moyens de mes ambitions, que ce soit en terme de finances ou de fainéantise temps, j'avais depuis longtemps réduit la voilure côté plantation. Je me contentais de quelques potées fleuries, de temps en temps, ou d'une brouette de condiments pour la cuisine.

Toujours ce besoin de joindre l'utile à l'agréable, chez moi c'est maladif !!!

Mais comme il est plus positif de chercher à se comprendre et à trouver une utilité à nos mauvais penchants, j'ai fini par saisir que je pouvais faire de ce plaisir/passion un challenge, un nouveau sens à donner à mon existence.

C'est comme ça que j'ai décidé, il y a quelques mois, de me lancer dans une nouvelle formation pour devenir productrice de PPAM : je veux cultiver mes plantes médicinales, puis les transformer en produits bons pour la santé, pour les proposer ensuite à la vente en direct auprès des gens intéressés.

Je veux maîtriser toute la chaine, de la production à la gestion d'entreprise, et pour cela, il faut que je retourne à l'école. Mais tout ça, je vous en parle déjà ici.

Dans cet article, je voulais vous parler de l'aspect "légal" du métier, car c'en est un, et il est particulièrement encadré. D'un autre côté, on pourrait tuer quelqu'un avec la bonne plante, autant que l'on peut le soigner, alors autant faire attention quand même.

Je savais que je ne voulais pas me lancer sans formation, pour obtenir un certificat ou un diplôme qui soit une reconnaissance et une preuve de mon professionnalisme vis à vis de mes futurs clients.

Mais ce que je ne savais pas, c'est que tout cela était particulièrement contraignant au niveau de la réglementation, et j'ai passé quelques semaines bien laborieuses pour en saisir tous les tenants et les aboutissants.

C'est comme ça que je suis arrivée à la conclusion que, oui je voulais bien être une gentille sorcière et en faire mon image de commerce, mais que, non, je n'entrerais pas en rébellion contre le système, et que je respecterais à la lettre les règles et les lois. C'est compliqué, tout n'est pas encore réglé d'un point de vue commercial mais comme je n'en suis pas encore à ce stade, cet article servira surtout de mémo et d'information sur le sujet.

Herboriste : persona non grata !

Passée l'excitation des premières recherches, j'ai découvert avec stupeur que le métier d'herboriste n'existait pas, ou plutôt, plus, et que, surtout, il était illégal que d'exercer ce métier.

Ben si.

Depuis 1941, la France a décidé qu'il était illégal de vendre des plantes qui ont des vertus médicinales. Du genre : sorcières, attention au bûcher !

Depuis les choses se sont un peu détendues, je vous la fais courte, mais on n'a toujours pas le droit de vendre des plantes en prétendant qu'elles ont des vertus pour soigner des maladies, on a le droit de les vendre en alléguant qu'elles ont des vertus alimentaires bonnes pour la santé. Ce qui n'est pas pareil.

Et si il vous venait l'idée de vouloir poser un diagnostic et de préparer un mélange (qu'il était, au passage, également interdit de préparer jusqu'en 2008 - Article D4211-11 du Code de la Santé Publique), vous vous exposeriez à des poursuites juridiques, voire pénales, pour exercice illégal de la pharmacie, voire de la médecine.

Pour faire un peu moins court, on peut produire des plantes et les transformer en tisanes par exemple, en alléguant que "la tradition voudrait" qu'elle soient bonnes pour telle ou telle pathologie, mais on doit également porter toutes sortes d'avertissements sur le paquet, notamment celui de devoir consulter son médecin en cas de doute ou de symptômes persistants.

Blablabla, blablabla.

Je reviendrais plus tard pour tout cet aspect juridique, légal et administratif lorsque j'en serais à ce stade mais sachez dores et déjà que c'est complexe à étudier, un brin fastidieux, et que j'y ai passé près d'un mois personnellement pour tout comprendre et saisir les nuances des différentes réglementations.

Dans mon cas, j'ai réussi à synthétiser les informations que je devrais nécessairement faire figurer sur mes emballages, ainsi que les recommandations légales que j'aurai le droit de diffuser, et les limites que je ne devrais en aucun cas franchir lors de la commercialisation de mes produits finis.

Tout ça pour vous dire que nous n'avons pas le droit de faire ce que l'on veut, que le sujet est très encadré, et que je ne conteste pas la chose, parce que les plantes peuvent être dangereuses voire mortelles et qu'en bonne sorcière que je suis, je vous ferais probablement quelques fiches de plantes vénéneuses un jour où je serais particulièrement bien énervée.

Mais en attendant, je me calque sur la réglementation en vigueur sans protester et j'apprends patiemment tout ce que je dois savoir sur le sujet.

Que dit la loi alors ?

Il faut se référer à l'article L4211-1 du Code de la Santé Publique (oui, je sais, vous ne le connaissez que rarement, je vous rassure, c'est le cas de tout le monde ou presque, y compris parmi nos dirigeants, mais moi je le maîtrise parfaitement depuis des années parce que, en tant qu'hypersensible, c'est le seul code susceptible de me protéger. Sauf que personne ne le connaît et surtout, personne ne veut l'appliquer, à commencer par les flics. Pourtant, ils gagneraient plus d'argent ! Fin du débat).

Cet article de loi recense les 148 plantes "libérées" (mais pas délivrées...) qui ont un usage traditionnel alimentaire considéré comme possédant des propriétés médicinales.

Et sorti de cette liste, point de salut !

On peut compléter cette liste avec celle établie par la DGCCRF (Direction Générale de la Concurrence, de la Consommation et de la Répression des Fraudes) ce qui permet de rajouter environ 300 plantes supplémentaires.

Donc je peux vendre mes plantes mais je ne dois pas associer à cette vente d'indications thérapeutiques, sous peine d'être accusée d'exercice illégal de sorcellerie heu de pharmacie.

Mais il faut donc être plus malin que le fou du roi et présenter ces allégations de santé d'une certaine manière, afin d'être :

- conforme au règlement CE n°1924/2006, chapitre IV (page 8)

- inscrites sur la liste des allégations autorisées par l'Union Européenne (Règlement UE 432/2012, annexes, page 4).

Pour les allégations de santé fonctionnelles génériques, un registre communautaire est disponible via une base de données en ligne publiée par l'EFSA. L'emploi de ces allégations est autorisé dans les conditions précisés par le registre en question (règlement CE n°1924/2006, articles 13 et 20).

Et il faut également ajouter toute une liste de mentions dont je vous fais grâce, concernant la quantité, le mode de consommation, les contre-indications en cas de problèmes de santé et les risques éventuels en cas de consommation excessive.

Si on veut faire simple, ce que je finirais probablement par faire pour avoir la paix, c'est ne pas précisé la moindre indication thérapeutique sur mes mélanges, pour qu'ils soient considérés par la loi comme étant de simples tisanes alimentaires. Point.

Mais il faut que les mélanges en question ne contiennent aucune plante réservée au monopole pharmaceutique, sinon c'est illégal.

Des fois je me demande si ce n'est pas plus simple que de faire pousser de la beu ??? Ok, je sors...

J'ai surtout dû me poser des tas de questions sur ce que je voulais faire : plantes au kilo vendues en coopérative ? plantes en vrac ? tisanes simples ? mélanges avec ou sans vertus thérapeutiques ? huiles essentielles ? macérats ? produits cosmétiques ou alimentaires ?

Bref les choses ne sont pas simples en France, et je vous passe le chapitre concernant le calcul des TVA !

Au final, j'ai choisi l'orientation "Ingestion", pour une "consommation sous forme de doses en complément d'un régime alimentaire normal pour apporter un effet nutritionnel ou physiologique" et donc comprendre au final que je relèverais de "la réglementation spécifique des compléments alimentaires" doit une TVA à... 5.5 % !

YOUPI !

Quand l'idée prend du plomb dans l'aile

A ce stade, il fallait être bien accrochée à son rêve pour poursuivre ses recherches. Mais pour une fois, je ne me suis pas laissée impressionnée pour autant et j'ai persévéré, même si le joli rêve en prend un coup et qu'on se dit qu'il faut vraiment y croire très fort pour parvenir à ses buts.

Mon joli jardin de sorcière devra se conformer à une réglementation bien précise et il faudra suivre le chemin tout indiqué si je ne veux pas me retrouver devant le tribunal des Inquisiteurs.

Et, de fil en aiguille, sur le bûcher.

Quand on voit le travail que ça demande, on se dit qu'on a bien fait de se lever tôt. Je sais que je ne travaille pas pour rien car je devrais apprendre toute cette réglementation par coeur pour présenter mon examen au final de ma formation. Donc je m'habitue doucement à tous ces termes un peu techniques et je prend de l'avance.

Rien n'est jamais vraiment perdu.

Et après l'aspect "je sais ce que je veux faire", celui de "je sais comment je dois le faire" prenait forcément la plus grande place.

Mais qu'il en faut plus pour me décourager !

Je ne me laisse donc pas abattre. Je potasse, j'étudie, je cherche à comprendre, je prends des notes, beaucoup de notes et certains jours, cela prend même plus d'ampleur que la culture des plantes elle même.

Mais qu'importe ! Cela fait partie du métier ? Je m'y conforme ! C'est parfois compliquée ? J'ai encore du temps pour tout assimiler.

C'est un vrai métier que l'agriculture, et même si le débat fait rage actuellement, que nos agriculteurs sont en grande souffrance, qu'ils se sentent rejetés par l'ensemble de la société actuelle, et que parfois, certains d'entre eux craquent et prennent des décisions terribles et ultimes, je me sens plus que jamais attirée par ce métier. Oh, bien sûr, rien à voir avec l'image traditionnelle de l'agriculture ! Pas de gros tracteur pour moi, ni de champs immenses à labourer ou de grands troupeaux à gérer, pas de dossiers complexes à remplir pour des subventions conflictuelles ni de tracas administratifs à n'en plus finir. Pas de stress mortel ou de dépression morbide non plus, je n'aurais pas besoin de ce métier pour gagner ma vie ni révolutionner le sujet.

Je veux juste planter des plantes médicinales. Qui auront de bonnes vertus pour notre santé à tous, à commencer par celle de ma famille et de mes enfants, puis si cela se fait, pour celle des autres qui voudront bien me faire confiance.

Pour le reste, j'ai conscience qu'on ne gagne pas vraiment bien sa vie dans ce domaine, que cela reste très confidentiel, voire prétexte à en faire sourire plus d'un et pas forcément de manière bienveillante.

Mais je m'en fiche un peu.

C'est l'occasion aussi pour moi d'apprendre de nouvelles choses et ma santé intellectuelle en a besoin, ainsi que de tendre vers un art de vivre qui m'inspire et m'encourage à croire qu'il y a du bon et du beau dans notre monde.

Je vous invite à me suivre dans mes apprentissages futurs, et peut être à partager avec moi vos propres expérimentations de culture, quelles qu'elles soient, pour cultiver notre curiosité et notre soif d'apprentissage tous ensemble.

A très bientôt,

Amicalement,

Isa

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